Pourquoi les acteurs sont devenus dépendants aux walled gardens
Au sein de leurs environnements logués (Google, Gmail, Google Chrome, YouTube, Facebook, Instagram, etc.), les walled gardens retiennent un fort volume de data propriétaire – les données de milliards d’utilisateurs – très prisées par les annonceurs. Celles-ci leur permettent de réaliser un reciblage ultra efficace en fonction des sites visités par les internautes et d’optimiser leur retour sur investissement. Des atouts maîtres pour les marques. La domination sur la data utilisateur est telle qu’aujourd’hui 75 % du marché de la publicité ciblée est intégré verticalement par Google et Facebook. Et la suppression des cookies tiers ne devrait rien arranger. En succédant à Apple et Firefox qui ont été les premiers à les supprimer de leurs navigateurs pour mieux répondre aux exigences du RGPD, Google Chrome qui détient 60% du marché scellera le sort des cookies. Par ailleurs, les géants sont aussi en mesure d’imposer leur vision de la protection de la vie privée. En effet, ce sont eux qui paramètrent l’utilisation des cookies sur les navigateurs et non les utilisateurs, comme c’est le cas sur les sites des éditeurs. En outre, à la fin des cookies tiers, ils auront encore l’avantage de pouvoir exploiter pleinement leurs données propriétaires tandis que le reste du marché ouvert utilisera encore des cookies (au moins jusqu’à 2022, quand Google Chrome les aura supprimé de son navigateur) et autres traceurs.
Une monnaie d’échange dont le marché va devoir apprendre à se passer
Pour l’heure, les acteurs se plient encore bien volontiers à la “norme” de ciblage actuelle tout en veillant à respecter la réglementation. Certaines formes de bannières présentes sur les sites, destinées à recueillir le consentement des internautes quant à l’utilisation des cookies lors de leur navigation font d’ailleurs actuellement débat. Suivant l’interprétation que fait la CNIL du RGPD, les “cookie walls”, qui barrent l’accès au contenu d’un site lorsque l’utilisateur ne consent pas au suivi de sa navigation par le biais des cookies, représente un frein au consentement libre de l’internaute. De leur côté, les éditeurs sont prêts à sacrifier une partie de leur audience pour s’assurer d’avoir les moyens de fournir aux annonceurs des moyens de cibler et assurer ainsi leurs revenus. Un litige qui, autant que la suppression des cookies sur les navigateurs, met en lumière les effets d’un marché trop centré sur l’utilisateur et éclaire les réflexions sur les nouveaux modèles à mettre en place dans l’ère cookieless à venir.
Vers un marché moins “user-centric” ?
Ce que suppose la fin des cookies, c’est en effet de ne plus suivre l’internaute tout au long de sa navigation mais de le cibler sur la base de son attention immédiate. Les solutions cookieless qui se mettent rapidement en place tiennent compte de cette future donne. La plupart d’entre elles fonctionnent sur le principe de la publicité contextuelle, grâce à l’analyse du contenu et/ou de la sémantique des pages visitées afin de proposer des annonces personnalisées en temps réel. Cependant, les possibilités sont nombreuses. L’industrie doit se réinventer et innover pour pérenniser le marché et préserver les éditeurs de la domination écrasante des grosses plateformes, et ce, sans cookie. La publicité sur Internet est nécessaire pour maintenir la gratuité du contenu en ligne; les cookies et autres traceurs, eux, ne le sont pas. Un changement de paradigme semble donc essentiel. Toutefois, la prise d’indépendance des acteurs vis-à-vis des géants dépendra d’une vraie volonté d’union dans un effort collectif pour identifier les solutions dont ont besoin les marques et redistribuer les budgets des annonceurs vers des acteurs qui ne sont pas juges et parties.Article initialement publié sur Widoobiz.
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